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Investir dans l’autonomisation des femmes génère d’importants dividendes en termes de paix et de prospérité

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« Nous avons l’opportunité de faire les choses différemment en 2022 », a déclaré Sima Bahous devant le Conseil à l’occasion de la Journée internationale des femmes. Elle a rappelé la hausse des dépenses militaires, les coups d’État militaires, les prises de pouvoir par la force qui ont suivi le début de la pandémie de Covid-19, effaçant les gains en matière d’égalité des sexes qui ont mis des décennies à se concrétiser. « Il est clair pour moi que, plus que jamais, nous avons besoin d’un autre modèle de leadership »

Décrivant l’inclusion des femmes dans la reprise économique comme « un élément essentiel » dans la poursuite de la paix, elle a déclaré que les femmes sont plus susceptibles de dépenser leurs revenus pour les besoins familiaux et d’apporter une plus grande contribution à la reprise. Pourtant, la reconstruction et l’investissement post-conflit sont toujours dominés par les hommes – et profitent massivement à ceux-ci.

La cheffe d’ONU Femmes a expliqué que les modèles d’exclusion, de discrimination et de normes de genre désuètes éloignent les femmes de l’emploi, de la terre, de la propriété, de l’héritage, du crédit et de la technologie

.Sima Bahous, Directrice exécutive d'ONU Femmes, devant le Conseil de sécurité.Photo ONU/Manuel EliasSima Bahous, Directrice exécutive d’ONU Femmes, devant le Conseil de sécurité.

« Apartheid entre les sexes » en Afghanistan

Mme Bahous s’est dite particulièrement préoccupée par l’impact d’un nouvel « apartheid entre les sexes » en Afghanistan, où l’emploi des femmes a fortement chuté depuis la prise du pouvoir par les Talibans.

Soulignant que plus de la moitié des pays fragiles et touchés par les conflits se trouvent en Afrique subsaharienne, où les pertes économiques dues à l’inégalité entre les sexes s’élèvent à 2.500 milliards de dollars, elle a noté que la propriété foncière des femmes dans les pays touchés par les conflits reste dangereusement basse. Au Mali, elle n’est que de 3%.

Selon elle, le secteur privé fait souvent partie du problème – pas seulement les industries extractives et agroalimentaires, mais de plus en plus les plateformes de télécommunications qui ont un rôle majeur à jouer pour faciliter l’inclusion et prévenir les discours de haine.

« Nous avons besoin de plus d’engagement, d’une plus grande responsabilisation et d’une responsabilité partagée », a-t-elle déclaré.

Elle a pressé le Conseil de sécurité d’utiliser les résolutions sur la République centrafricaine et la République démocratique du Congo, par exemple, pour demander l’inclusion significative des femmes non seulement dans la consolidation de la paix, la prévention des conflits et le relèvement, mais aussi dans la prise de décisions et l’analyse sexospécifique.

Elle a invité le secteur privé à jouer un rôle plus important dans le Fonds des femmes pour la paix et l’aide humanitaire, qui a soutenu plus de 500 organisations de femmes dans 26 pays depuis 2016. « Il y a beaucoup plus à faire pour multiplier par cinq les financements pour les organisations de femmes dans des contextes de crise d’ici 2030 », a-t-elle assuré.

Le Pacte sur les femmes, la paix et la sécurité et l’action humanitaire – qui vise à faire avancer ces questions au cours des cinq prochaines années – pourrait bénéficier d’un engagement accru des banques multilatérales de développement et du secteur privé, pour aider à renforcer les mécanismes de protection sociale, promouvoir les entreprises détenues par des femmes et lutter contre la législation discriminatoire.

Des années de progrès effacées

Kristalina Georgieva, Directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), a déclaré que la guerre en Ukraine est un rappel clair que les conflits imposent un coût terrible à la vie humaine.

Soulignant que les crises – qu’elles soient déclenchées par des conflits, des pandémies ou des urgences économiques et commerciales – menacent de faire reculer des années de progrès en matière d’égalité des sexes, elle a déclaré que deux fois plus de femmes que d’hommes ont perdu leur emploi pendant la crise de Covid-19 notamment en raison d’un faible niveau de protection sociale.

La participation des femmes au marché du travail est également 20% inférieure à celle des hommes.

Le monde aussi connu d’énormes pertes d’apprentissage : 20 millions de filles dans les pays en développement pourraient ne jamais retourner à l’école, a-t-elle déclaré.

Elle a aussi noté que si les pays subsahariens réduisaient la violence sexiste pour se rapprocher de la moyenne mondiale, ils pourraient voir des gains de PIB à long terme de 30%.

La cheffe du FMI a déclaré que l’égalité des sexes est essentielle à la croissance, à la résilience et à la stabilité socio-économique, soulignant qu’« il est extrêmement important que les femmes et les filles puissent atteindre leur plein potentiel ». « Nous savons que les sociétés avec plus d’égalité des sexes ont tendance à être plus résistantes à la violence et aux conflits », a-t-elle déclaré. Pourtant, trop souvent, les femmes restent exclues de la prise de décision.

Elle a exhorté les organisations internationales, les gouvernements et le secteur privé à travailler ensemble pour combler les écarts entre les sexes et améliorer les perspectives de développement.

Pour sa part, le FMI se concentre sur l’aide à ses membres pour concevoir et mettre en œuvre des politiques économiques qui garantissent une plus grande résilience et croissance, a-t-elle déclaré. Il cible particulièrement les dépenses sociales dans les efforts visant à améliorer l’éducation, les soins de santé et la protection sociale et, par conséquent, à créer des sociétés plus fortes. Une approche adaptée à chaque pays est vitale.

« Les femmes et les filles sont elles-mêmes de puissants agents de changement », a-t-elle déclaré, citant des exemples en Irlande du Nord, en Colombie et au Libéria, où des femmes ont contribué à mettre fin à la guerre civile.

Moussokoro Coulibaly, Présidente du Réseau de femmes opératrices économiques dans la région de Ségou, au Mali, devant le Conseil de sécurité.Photo ONU/Evan SchneiderMoussokoro Coulibaly, Présidente du Réseau de femmes opératrices économiques dans la région de Ségou, au Mali, devant le Conseil de sécurité.

Les femmes maliennes au coeur de la résilience

Moussokoro Coulibaly, Présidente du Réseau des femmes opératrices économiques de la région de Ségou au Mali, a déclaré que son organisation soutient la relance économique des femmes et l’engagement des femmes dans les efforts de paix et de cohésion sociale. Elle rassemble 7.847 femmes et travaille avec 120 organisations de femmes.

« Investir dans l’autonomisation économique des femmes génère des dividendes sociaux à court et à long terme et améliore la participation des femmes à la prise de décision et à la résolution des conflits », a-t-elle expliqué.

Pendant et après les conflits, on constate une forte augmentation du nombre de ménages dirigés par des femmes. « C’est grâce à leurs efforts que nos communautés et nos familles sont restées résilientes ».

Notant que les normes sociales et culturelles sont utilisées pour justifier des pratiques préjudiciables aux droits des femmes, et que les ressources financières ne sont souvent pas adaptées aux activités que mènent les actrices économiques, elle a déclaré que tous ces facteurs entravent la participation des femmes à la prise de décision publique.

Selon elle, les femmes sont les piliers de leurs familles et de leurs communautés : « Nous jouons un rôle dans la construction de la paix. Partout où les femmes sont actives, elles s’engagent pour la cohésion sociale au sein de leurs communautés, dans les initiatives locales de résolution des conflits, dans l’accueil des personnes déplacées et des survivantes de violences basées sur le genre, dans l’éducation des enfants et dans la sensibilisation à la non-violence et à la paix ».

Il est impératif que l’autonomisation des femmes soit au cœur des résolutions, des traités de paix et des programmes pour une paix durable.

Elle a exhorté les Nations Unies à faciliter l’accès des femmes à un financement durable et flexible et à aider les gouvernements à établir et à mettre en œuvre des politiques qui favorisent l’autonomisation économique des femmes.

https://news.un.org/fr/story/2022/03/1115922

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