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La situation en Libye demeure « très volatile », explique l’ONU au Conseil de sécurité

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La situation sécuritaire en Libye « reste encore très volatile », et la « politisation » du contrôle de la compagnie nationale de pétrole aggrave une « situation économique désastreuse », a rapporté la Sous-Secrétaire générale de l’ONU pour l’Afrique, Martha Pobee, devant le Conseil de sécurité ce lundi.

Mme Pobee a aussi indiqué aux membres du Conseil que malgré les progrès réalisés, « une impasse constitutionnelle et politique persistait », entretenant une atmosphère tendue sur le plan sécuritaire, avec un nombre accru d’affrontements à Tripoli et ses environs.

« Nous avons assisté à des manifestations de Libyens frustrés par l’absence de progrès pour la tenue d’élections et la médiocrité des services publics. En outre, la situation des droits de l’homme dans le pays reste très préoccupante », a-t-elle résumé.

Le Parlement de Tobrouk pris d’assaut et endommagé

Ainsi, le 1er juillet, des manifestations ont eu lieu dans toute la Libye, notamment à Tripoli, Benghazi, Al-Bayda et Tobrouk. Le bâtiment du Parlement à Tobrouk a été pris d’assaut et endommagé.

Les manifestants ont exprimé leur frustration face aux divisions politiques persistantes et à la détérioration des conditions de vie ; ils ont exigé la tenue rapide d’élections, ainsi que des solutions à la crise de l’électricité et à la pénurie de carburant dans le pays.

Mme Pobee a exhorté les acteurs politiques libyens à « entendre l’appel de leur peuple » et à « faire preuve d’un leadership responsable en répondant à leurs doléances ».

La Sous-Secrétaire générale a rapporté que les groupes armés continuaient de se positionner soit en faveur de M. Dbeibah, le Premier ministre basé à Tripoli, ou de M. Bashagha, désigné en mars Premier ministre par le parlement et dont le gouvernement s’est installé à Syrte. Le risque d’escalade augmente.

« L’activité militaire a également augmenté dans la région occidentale, en particulier sur le flanc oriental de Tripoli, à Misrata et dans les faubourgs de Syrte », a ajouté Mme Pobee, qui a fait part de sa profonde préoccupation à la suite d’affrontements armés ayant eu lieu à Tripoli dans la nuit du 21 juillet ainsi que d’escarmouches entre groupes armés à Misrata le 23 juillet, ayant occasionné « un nombre non confirmé de victimes civiles ».

Réaffirmant l’importance du maintien du cessez-le-feu en Libye, Mme Pobee a exhorté toutes les parties à faire preuve de la plus grande retenue et de renouer le dialogue.

Une ruine à Benghazi, en Libye, en mai 2022. Les multiples destructions sont un rappel des années de conflit.
© UNOCHA/Giles Clarke
Une ruine à Benghazi, en Libye, en mai 2022. Les multiples destructions sont un rappel des années de conflit.

Discordes autour du contrôle de la compagnie nationale de pétrole

La Sous-Secrétaire générale pour l’Afrique a aussi déploré les conséquences du désaccord actuel concernant la direction de la National Oil Corporation (NOC), la compagnie nationale de pétrole en Libye.

Le 12 juillet, M. Dbeibah a nommé M. Bengdara, l’ancien gouverneur de la Banque centrale libyenne, au poste de président de la NOC. Il a remplacé M. Sanalla, qui dirigeait la NOC depuis 2015. Or « M. Sanalla a rejeté la décision de le remplacer et a l’intention de porter l’affaire devant la justice libyenne », a indiqué Mme Pobee.

La Libye a certes repris ses exportations de pétrole le 19 juillet, mais la réduction drastique des exportations qui avait cours depuis plus de trois mois a coûté au pays 4 milliards de dollars, et il est trop tôt pour confirmer si la production reprendra à pleine capacité, et si les changements d’organigramme au sein de la NOC auront un impact supplémentaire sur la production et l’exportation.

« Nous soulignons la nécessité pour la NOC de rester neutre et libre de toute pression politique », a appuyé Mme Pobee, qui a appelé les acteurs concernés à « surmonter leurs divergences » en vue d’assurer la pleine exploitation des champs pétrolifères du pays.

Elle en a profité pour réaffirmer que les ressources naturelles de la Libye « appartenaient à tous les Libyens », et que les revenus des exportations pétrolières devaient être distribués de manière équitable et utilisés pour améliorer les services publics.

Droits de l’homme bafoués

La situation des droits de l’homme en Libye reste très préoccupante, la situation économique désastreuse ayant notamment eu un impact négatif sur les droits fondamentaux de la population aux services de base, à l’accès à la nourriture, à l’eau et à l’assainissement, ainsi qu’aux soins de santé et à l’éducation.

La Mission d’appui de l’ONU en Libye (MANUL) a reçu des informations selon lesquelles les installations médicales manquaient d’oxygène pour les opérations chirurgicales et les soins intensifs. Les cliniques du pays sont aussi confrontées à de graves difficultés en raison des coupures de courant prolongées et du manque de carburant pour les générateurs.

Arrestations arbitraires et violences faites aux femmes

La Mission a également reçu des informations selon lesquelles des dizaines de manifestants ayant participé aux manifestations du 1er juillet ont été arbitrairement arrêtés par des groupes armés, et rapporté une augmentation des incidents de violence contre les femmes pendant l’Aïd, y compris le meurtre d’au moins six femmes – dont une fille – à Benghazi, dans l’est, et à Ain Zara et Gharyan, dans l’ouest.

« Pendant ce temps, l’espace civique continue d’être érodé. Des restrictions arbitraires continuent d’être imposées aux organisations de la société civile. Les femmes et les hommes politiquement actifs qui défendent les droits de l’homme sont la cible de discours de haine et d’incitation à la violence, ce qui compromet leur sûreté et leur sécurité », a développé Mme Pobee.

L’ONU demeure préoccupée par le maintien en détention de neuf travailleurs de la société civile et humanitaires arrêtés entre novembre 2021 et février 2022 pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression. « Le 6 juillet, quatre de ces personnes détenues arbitrairement n’ont de nouveau pas été autorisées à être présentes à leur deuxième audience judiciaire prévue », s’est-elle inquiétée.

Haine anti-migrants

La MANUL a continué de recevoir des informations faisant état de graves allégations de torture à l’encontre de Libyens, de migrants et de demandeurs d’asile dans les centres de détention et les prisons.

La Mission a observé une vague de discrimination, d’expulsion et d’arrestations arbitraires de migrants alors qu’ils célébraient l’Aïd dans les villes de l’ouest de la Libye, Zuwara, Zawiya, Tripoli, Misrata et Sabrata.

Abdul, originaire du Darfour, a été contraint de vivre dans une maison en Libye et de travailler. Il demande maintenant l'asile.
UNICEF/Juan Haro
Abdul, originaire du Darfour, a été contraint de vivre dans une maison en Libye et de travailler. Il demande maintenant l’asile.

« Le plus préoccupant est qu’une station de radio de Zawiya a diffusé un discours de haine à l’encontre des migrants, affirmant qu’ils étaient responsables de la propagation de maladies », a déploré la Sous-Secrétaire générale, qui a demandé aux autorités du pays de mener l’enquête.

« Si la priorité de l’ONU en Libye reste de faciliter le retour au processus électoral, nous devons continuer à soutenir et à encourager nos homologues libyens à s’attaquer efficacement aux principaux facteurs de l’impasse politique et économique, notamment ceux ayant déclenché les manifestations du 1er juillet. Le message des jeunes Libyens à leurs dirigeants est de faire davantage pour améliorer leurs conditions de vie et d’organiser des élections le plus rapidement possible afin de choisir leur représentant légitime », a pointé Mme Pobee.

Une mère montre ses doigts et ceux de sa fille couverts d'encre après avoir voté à Benghazi lors d'élections en Libye (photo d'archives).
MANUL Une mère montre ses doigts et ceux de sa fille couverts d’encre après avoir voté à Benghazi lors d’élections en Libye (photo d’archives).

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